Chant d’amour
Sur des musiques jouées en direct, les danseurs Hèdi et Ali Thabet magnifient avec le circassien avec Mathurin Bolze le drame de l’élan amoureux.
Autant restituer la phrase telle qu’elle a été écrite par René Char : « Nous sommes pareils à ces crapauds qui dans l’austère nuit des marais s’appellent et ne se voient pas, ployant à leur cri d’amour toute la fatalité de l’univers. » Quelle marque de désespoir, et surtout quel choix étrange que de baptiser ainsi un spectacle de danse qui traite du… mariage. Même si la façon d’aborder l’union se fait de manière non conventionnelle – deux hommes, dont un unijambiste en béquilles et une femme sensuelle dans sa robe de mariée festoient comme s’ils étaient au combat ! La vanité de toute entreprise amoureuse, mais aussi l’élan irrépressible, sont inscrits dès le titre. Un sentiment renforcé dans ce spectacle à géométrie variable par la présence frontale d’un orchestre qui interprète le répertoire Rébètiko, une musique du début XXe née de la diaspora des Grecs d’Asie Mineure, mais aussi de la musique populaire tunisienne pour une belle fusion des cultures.
Écrit 5 ans plus tôt par Mathurin Bolze et Hèdi Thabet, Ali semble le pendant de Nous sommes pareils, de manière si viscérale que désormais les deux pièces sont indissociables. Avec un dispositif réduit, un duo, quatre béquilles, une chaise, une lampe et un morceau de Rébètiko, cette courte pièce raconte la rencontre, une nouvelle fois le rapprochement, mais aussi la distance qui se crée. Avec toujours le corps en ligne de mire. (E.A.)
