Les Giboulées 2020 : une invitation à oser prendre des risques que les artistes nous proposent
« La poésie produit des imaginaires désirables. », écrit Renaud Herbin dans l’édito du festival Les Giboulées. La biennale Corps-Objet-Image invite à nouveau des artistes, des publics et des professionnels à observer des univers fantaisistes et créatifs sous un kaléidoscope.
Réveillez l’aventurier / l’aventurière en vous ! Les Giboulées 2020 nous ouvrent cette année les portes vers d’autres cosmos. Les artistes, tels Alice Laloy, Mathieu Chamagne, Camille Boitel, Perrine Mornay ou Sébastien Kauffmann, regarderont dans leurs spectacles au-delà de leur art et lieront leur savoir-faire à des réalités bien réelles et humaines.
Des réalités augmentés en passant par la magie, nous aurons l’occasion de voir les artistes tourbillonner sur les scènes différentes et s’incruster dans l’espace public.
De nombreux projets nous permettront également de prendre la parole et d’aller à la rencontre des artistes. Que ce soit avec L’Assemblée des spectateurs, la Radio pratique(s) ou L’école des risques.
« Si les années soixante furent psychédéliques littéralement, ce qui «fait apparaitre l’esprit » nous vivons des années cosmodéliques : c’est à l’instauration d’un cosmos habitable qui renouvelle les conditions et les formes de l’hospitalité que l’époque travaille. Cela ne se fera pas sans dessiner, cultiver, payer, faire mais aussi construire, nourrir, négocier, appâter des formes d’attention inédites, y compris envers un ensemble d’entités et d’événements nouveaux dont le théâtre participe, au milieu d’une multitude d’autres initiatives, à entretenir la possibilité d’existence. »
– Jérémy Damian, Cosmodélie
Revue Corps-Objet-Image 04, Théâtres de l’attention (Parution en version papier, le 19 mars 2020)
Prenez un sac à dos vide, mettez y toute votre curiosité et vos questions et claquez la porte derrière vous, car : le festival Les Giboulées nous appelle à le rejoindre et à passer sept jours dans un cosmos surprenant (et risqué !).
Les créations invitées au festival :
Rue d’Orchampt II Groupe Zur
Du 13 au 15 mars 2020 I TJP Petite Scène, Strasbourg
Spectacle immersif de vraie-fausse magie, Rue d’Orchampt est un entre-sort, version contemporaine de ces baraques foraines dans lesquelles on exposait les monstres. Le public est invité à une déambulation à l’intérieur d’une étrange maison, pleine d’intrigants détails : des personnages apparaissent dans les miroirs et les tableaux s’animent…
Nous basculons ensuite dans la fabrique de l’image, à la rencontre des esprits des lieux. Contemplateur actif, le spectateur participe à l’émergence poétique et nourrit ainsi l’espace d’illusion pour les prochains visiteurs.
***
Bâton II Perrine Mornay / Collectif Impatience
Le 14 mars 2020 I Théâtre de Hautepierre, Strasbourg
Perrine Mornay orchestre sur scène son improbable rencontre avec Mélanie Potin, compétitrice de twirling bâton. La metteuse en scène crée un duo détaché de l’imagerie folklorique des majorettes pour évoquer la réalité du monde de la compétition. Cette étrange conférence acrobatique sur nos subsistances repose sur l’attente de la chute et notre besoin de légèreté, ces instants tragiques où nous pouvons assister à l’échec.
Perrine Mornay entremêle sa propre histoire à celle de cette jeune sportive pour évoquer le passage à l’âge adulte, le désir de s’inventer une vie.
***
Psaumes pour Abdel II Laura Fedida
Le 14 mars 2020 I Espace K, Strasbourg
Depuis qu’Abdel est mort, poursuivi par les forces de l’ordre dans un tunnel du RER, Cheveux Roses, chaque année depuis ses 17 ans, brûle, brûle, brûle. L’impossibilité de son deuil se déroule autour d’une cabine téléphonique et de petits tas de bois calcinés.
Cette pièce engagée de la jeune Laura Fedida prend les atours d’un rituel amoureux, charriant colère et sentiment d’iniquité. Entre procès factice et commentaires acérés d’un chœur de pigeons ivres, les matériaux bruts deviennent marionnettiques. Au milieu de riffs de guitare et de voix cassée, la violence gronde et s’enflamme sur scène dans une ode à vif pour tous ceux qui vivent dans les marges: sans abris, paumés, invisibles.
***
À poils II Alice Laloy / Compagnie S’appelle reviens
Du 15 au 18 mars 2020 I TNS – Espace Klaus Michael Grüber, Strasbourg
Alice Laloy se plaît à composer cette nouvelle pièce d’après un malentendu : des hommes d’âge mûr, poilus, en t-shirts noirs et cuirs cloutés rencontrent un public de jeunes enfants. Mais rien n’a été prévu: pas de gradin, pas de coussins. Juste ces trois tatoués barbus, vrais routiers du rock avec leurs caisses pleines dans un grand espace vide, en train de préparer un autre spectacle pour un autre public.
À rebrousse-poil des idées reçues, la metteuse en scène invente une transformation, passant du vide à un cocon velu et charnu qui englobe spectateurs et acteurs.
***
C’est un secret II Aurélie Morin / Le Théâtre de Nuit
Le 17 mars 2020 I Le Préo – Oberhausbergen
Librement adapté de la pièce de théâtre de Maeterlinck, C’est un secret allie la chorégraphie au théâtre d’ombres et de figures. Frère et sœur, Tyltyl et Mytyl entament un voyage à la recherche de L’Oiseau bleu dans un souvenir, un cimetière, une jungle, un jardin des bonheurs mais aussi dans l’avenir, car ils ont la certitude qu’en le voyant, leur mère retrouvera le sourire. La vieille fée le leur a dit.
Artisans d’un rêve éveillé, trois personnages actionnent des installations: lumières mobiles, entrelacs de tubes aux mouvements imprévisibles, bâches plastiques volubiles, écrans baladeurs ou translucides.
***
ORA (Orée) II Vania Vaneau / Cie Arrangement Provisoire
Du 17 au 18 mars 2020 I Pole-Sud, Strasbourg
ORA (Orée) est un seuil, une recherche des interstices qui séparent l’activité et la passivité, la présence et l’absence, le naturel et l’artificiel. Cette traversée du noir à la couleur joue avec la superposition d’une palette d’images et d’états de corps, qui coexistent comme dans un rêve.
Dans une chorégraphie de l’accumulation, le trio d’interprètes construit des paysages et des imaginaires en perpétuelle transformation. Les fictions éphémères de Vania Vaneau naissent du rapport de l’individu à des matières “actives” (papier froissé, grillage, tissu…) qui agissent comme filtres, échos ou passages.
***
間 (ma, aida, …) II Camille Boitel & Sève Bernard / L’Immédiat
Du 18 au 20 mars 2020 I Maillon, Strasbourg
La circassienne Camille Boitel se lance le défi de créer 36 micro-fictions dans un seul et même spectacle de moins d’une heure. Étreintes, disputes, fragments de vie et de rencontres se nouent pour disparaître aussi vite. Ces variations autour de tentatives d’histoires d’amour impossibles ne parlent que de l’art théâtral, de l’endroit où tout est en train d’avoir lieu et d’arriver.
Un essai frénétique pour user le théâtre jusqu’à la moelle en dégradant l’espace pour le mettre en miettes. Fidèle à ses habitudes, la scène sera encombrée de matériaux usuels et modelée par une mécanique ingénieuse.
***
Vague intérieur vague II Julie Nioche // A.I.M.E. – Association d’individus en mouvements engagés
Du 19 au 20 mars 2020 I TJP Grande Scène, Strasbourg
La chorégraphe Julie Nioche part à l’assaut des imaginaires qui construisent nos identités multiples. Ils sont ici racontés en gestes, voix et musiques dans une scénographie mouvante. Après une collecte de perceptions lors de rencontres en tête-à-tête, elle explore avec danseurs et musiciens les micro-fables qui nous traversent de façon individuelle et collective.
Vague intérieur vague nous invite à voyager parmi des archétypes : se sentir baleine ou arbre, être mi-humains mi-animaux, disparaître en fumée, devenir monstre, se découvrir des pouvoirs… Cette pièce rend visible et orchestre la poésie de ces personnages qui peuplent nos mondes intérieurs.
Plus d’informations sur le site du TJP – Centre Dramatique National Strasbourg – Grand Est : www.tjp-strasbourg.com
Photo : L’ERRANCE EST HUMAINE (Géraldine Aresteanu)