Autour d’un projet de mariage, deux factions irréconciliables d’une même famille se livrent une guerre de salon, portée par des alexandrins d’une clarté et d’une drôlerie redoutables. Benoît Lambert poursuit son exploration des œuvres de Molière avec cette pièce pleine de péripéties, où le savoir est au cœur des enjeux de pouvoir.
Misogyne, Molière ? Si sa pièce a longtemps été vue comme une moquerie cruelle face à l’ambition émancipatrice des femmes, le metteur en scène Benoît Lambert relève le défi d’en démontrer les nuances et les complexités. Dans un monde où les hommes ont les pleins pouvoirs, il est difficile pour Philaminte, Armande et Bélise d’être femme, fille, sœur et mère. Alors leur vie devient revendication, jusqu’à la radicalité. Elles veulent apprendre, penser et décider comme les hommes. Aveuglées par leur fanatisme, elles se laissent subjuguer par le pédant Trissotin, qui convoite Henriette, sœur d’Armande. Mais Chrysale, leur père, entend unir Henriette à l’honnête Clitandre et cherche à contrecarrer le plan des femmes. Les deux clans s’affrontent dans un jeu de massacre, où chaque personnage fait l’expérience de ses propres contradictions. Tout comme avec L’Avare, accueilli à Colmar en 2023, Benoît Lambert joue sur la distance qui sépare notre époque de celle de Molière et met en lumière ce que ce texte a à nous dire aujourd’hui, lorsqu’il fait écho à nos imaginaires contemporains.