Qui suis-je ?
Parfois on se tire tout seul une balle dans le pied. Et après ? Est-ce qu’on peut encore affronter son propre reflet dans la glace, ou est-ce qu’on porte ce ressentiment jusqu’à la fin de sa vie ?
John Gabriel Borkman est un banquier condamné pour détournement d’argent, écrasé par le monde de la finance. Cela fait 8 ans qu’il vit enfermé chez lui, depuis sa sortie de prison. Il ne prête aucune attention à sa femme, qui vit embuée dans ses problèmes d’alcool. Entre eux, il y a leur fils. Cette vie de petite bourgeoisie tranquille va être secouée par l’arrivée de la belle-sœur de Borkman, une vraie bombe à retardement…
Henrik Ibsen n’a pas son pareil pour dépeindre la vie de la classe moyenne et faire d’un dîner en famille un peu tendu une pièce tragique. Ses personnages sont des monstres de vulnérabilité. Mais ils la dissimulent, et ne laissent le spectateur approcher que partiellement et par petites touches.
Ils nous montrent la profondeur de l’être humain, sa fragilité, sa capacité à faire le grand écart entre le comique et le dramatique. Cette mise en scène de Simon Stone, très encensée (il a été triplement récompensé du Nestroy Preis et régulièrement loué par le magazine Theater heute), transpose l’intrigue au 21e siècle. Dans une histoire dont il n’a gardé que la colonne vertébrale, il crée un homme moderne, brisé, à la recherche d’un peu d’espoir. Dans un décor épuré et sans fioritures, le metteur en scène laisse les dialogues et chaque petit geste embarquer le public. Il lui présente une histoire qui pourrait avoir lieu chez tout le monde, derrière les portes fermées. C’est cela, le génie d’Ibsen. C’est aussi le talent de Simon Stone, et de grands comédiens. A ne pas rater. (J.L.)
Avec
Martin Wuttke, Birgit Minichmayr, Max Rothbart, Caroline Peters, Nicola Kirsch, Roland Koch, Liliane Amuat
Mise en scène
Simon Stone
