Deux hommes sont perdus dans le cosmos. Plus l’un est fort, plus l’autre est faible et sombre dans sa mélancolie. Comme deux pôles électriques, ils survivent dans d’étranges contrées lointaines, en apesanteur. La corporalité même des interprètes raconte leur impuissance ou leur rêve de puissance. Leur univers est entièrement bricolé, Jeanne Candel faisant confiance aux outils artisanaux et aux artifices traditionnels de la fiction théâtrale : ici ni haute technologie, ni écrans. Juste quelques accessoires détournés de leur fonction première comme témoin des déboires de ces idées folles d’envoyer des Terriens dans l’espace.
Tout s’imagine avec trois bouts de scotch et un chant sacré, une trompette et une chaussette, pour former un poème concret et jubilatoire conjurant les ténèbres. Cette nouvelle création s’inspire de deux séquences sur des cosmonautes “abandonnés” dans la station MIR dans Le Goût du faux et autres chansons (2014). Fusées en est une sorte de spin-off, un récit de la conquête de l’espace où l’on mime même les problèmes de transmissions avec la Terre. On voit tout alors qu’il n’y a rien. L’art de la suggestion, apportant une dose d’humour décalé dans un théâtre des opérations, fait appel à l’imaginaire d’enfance qui sommeille en nous.